#18 La Vie d’Artistes : Var Azur TV – La Grande Emission : « Une nuit avec Banksy »
Publié le 27 octobre 2018 à 08h00Pour cette 18é chronique un « invité » exceptionnel BANKSY ou plutôt son hôtel subversif : le Walled Off Hotel à Bethléem en territoire palestinien.
Je vous propose de découvrir cette chronique « Une nuit avec Banksy » tout en lisant les quelques lignes qui suivent…
« Une nuit avec Banksy ! »
« Excité comme une puce sur le dos d’un chien au pedigree international, je me retrouve débarqué́ en terre in(re)connue (même si mon embarquement n’a pas été́ de tout repos quand il a fallu expliquer à une jeune Israélienne du service de sécurité́ que l’Algérie où je suis né était un département français en 1961). Bref ! Me voilà̀ au «pied du mur» face au Walled Off Hotel (traduction : hôtel muré et en clin d’œil à la chaîne hôtelière Waldorf), dernière création excentrique et artistique de Banksy à Bethléem en territoire palestinien.
Il faut dire que l’ami Banksy – même si il n’est ami avec personne car comment être ami avec quelqu’un que l’on a jamais vu (sauf sur Facebook !)- aime jouer et déjouer avec les codes et avec les noms de lieux connus. En septembre 2015 (cf une belle pleine page de Var-matin), j’avais eu la chance de me rendre au Dismaland, dans le nord de l’Angleterre, qui reprenait, à la stupéfaction internationale, les animations et déjà dénonciations, sous forme artistico-satirique des Disneyland, de la société de consommation et du pouvoir des médias sur notre society.
1917-2017 mais pas que…
Le Palestinien est sympa. Le Palestinien est pauvre mais il a la chance d’avoir vu se poser depuis 2017, le doigt artistique et opportuniste du street artiste le plus connu et le moins vu que cette planète ait pu supporter après ou avant les Daft Punk, Fantomas et Jésus Christ… Il était prévu que cet établissement ne dure que un an (Banksy aime les lieux éphémères tout comme son art) mais le succès du public en attente de découvertes subversives ne s’est pas fait attendre. Néanmoins, étant donné que l’Arlésienne pro-palestinienne qui serait né à Bristol en 1974 et qui ne serait ni plus et surtout moins que le leader du groupe Massive Attack, Robert Del Naja, alias 3D, n’est pas homme(s) – c’est peut-être même un collectif d’artistes ? – à la philanthropie éternelle (comme le natif de Bethléem). J’imagine, vu le petit nombre de chambres occupées pendant mon séjour, que ce lieu (saint) ne durera pas éternellement. Ce véritable hôtel chico-rococo à la façade trompe l’oeil compte neuf chambres dont les prix oscillent entre 30 € pour le dortoir collectif reconstruit avec le surplus de l’armée israélienne (pas folle la guêpe…), et 985 € pour une suite digne d’un chef d’Etat corrompu (ce n’est pas une NDLR mais c’est Banksy lui-même qui le claironne sournoisement sur son site Internet) ou d’un donaldtrumpien (NDLR) avec jacuzzi et lit royal que j’ai eu la chance de visiter pour vous – et surtout pour moi. Quant à la chambre « Banksy » que j’ai occupée, je ne donnerai pas le prix de la nuit par pur respect pour mon comptable. Celle-ci est décorée de multiples objets détournés ou non qui font plus rappeler à une scène de Alice au pays des merveilles qu’à un modeste logement d’un autochtones (tiens je ne savais pas que ça s’écrivait comme cela !)…
Cet hôtel offrant « la pire vue au monde – c’est imprimé sur les tee-shirts du personnel) est agrémenté́ au rez-de-chaussée d’un salon anglais (rappelant la «présence» des rosbeef en Palestine en 1917) et tous décorés à 80 % par « The artist » avec la « complicité́ » de la Canadienne Dominique Pétrin (qui a dû bien l’être pour garder secret la rénovation de cet ancien bâtiment) et du Palestinien Sami Musa. Autre bonne nouvelle, la majorité du personnel a été embauché sur place et ça c’est bien pour le Palestinien !
Quel plaisir ! (pour ceux qui aiment le monde et l’humour noir de Banksy et pour les autres, allez à Art-O-Rama) oui, quel plaisir de séjourner dans l’une de ces chambres chichement décorées. L’âme, l’ombre et le léger parfum de scandale dénoncé́ par ses peintures et pochoirs planent dans chaque pièce. Le diable est dans le détail disait l’autre, alors cet hôtel peut être considéré comme le purgatoire artistique bien-sûr !
« Wall you need is Love ! »
C’est donc dans cette pénombre ambiante digne des meilleurs pubs anglais du début du siècle dernier, que l’on pourrait s’attendre à̀ « recevoir la lumière » et que la vue de chaque chambre se doit d’offrir dans un 3 étoiles (à Bethléem ça tombe bien !) et bien non ! Là aussi le « Casper arty » en remet une couche (de peinture ! oui je sais, elle est facile…) car chaque fenêtre donne directement sur le mur de séparation ou de protection selon de quel côté́ on se situe, histoire de rappeler à chaque « occupant » de l’hôtel que ce conflit dure depuis 70 ans.
Le « bon côté́ » des choses c’est que cette « implantation » de béton offre une palette à tous les street artistes de la planète (ou le contraire toujours en fonction du côté́ où on se situe..). Bien sûr, comme je me l’étais promis, je n’ai pas hésité́ à apporter ma pâte et ma «bombe» aérosol, et à immortaliser la présence de la Galerie LISA Toulon sous forme d’un pochoir, juste en face de l’entrée de l’hôtel. Vous le découvrirez certainement si vous y allez un jour, ou pas ! Mais, cherry on the cake, cet établissement regorge (ne pas oublier le «r», ne pas oublier le «r»…) de jolies surprises. Une expo d’artistes palestiniens à l’étage (comme la grotte éponyme – « laitage » – toujours à̀ Bethléem) et un musée dédié́ à la cause viennent informer les visiteurs, «occupants» ou non de l’hôtel.
C’est donc avec une certaine fierté́ (c’est ma chérie qui me l’a dit !) que j’ai accompli ce petit miracle (moi aussi !). Une nouvelle fois en trois ans (Dismaland 2015 AP. J-C, Walled Off Hotel 2018 AP. l’autre), j’ai suivi les pas (de mon père spirituel) et les idées follement « sacartistiques » de Banksy. C’est sans me faire prier (ça tombe bien, j’étais sur place…) que je pense pouvoir vous apporter la confirmation (juste avant la communion), en m’endormant cette nuit (après avoir essuyé une « massive attaque » de moustiques), là, en plein cœur de Bethléem, non pas sous la voûte étoilée mais sous la tête de lit de Banksy représentant un soldat israélien et un combattant palestinien qui se taquinent à coup de polochons, je peux affirmer haut et fort et sans avoir pour cela besoin d’une résolution de l’ONU : « Oui ! J’ai passé́ une nuit avec Banksy ! Et j’ai adoré !»
Votre envoyé très spécial : Jean-François Ruiz allias Peter